Ombres & Complot - Chapitre 04

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Alis resta un bout de temps sous la douche perdue dans...
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Partie 4 de la série de 12 pièces

Actualisé 06/07/2023
Créé 11/25/2015
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Alis resta un bout de temps sous la douche, perdue dans ses pensées. L'eau chaude qui coulait sur ses blessures était douloureuse, mais elle la ressentait également comme purificatrice.

Quand elle quitta à regret sa douche, il devait déjà être pas loin de quatre heure vu la luminosité extérieure. Elle enfila une culotte, un chemisier bordeaux, un pantalon noir assez épais et ses baskets blanches. L'heure tournait et elle n'écartait pas la possibilité de presser fortement l'allure pour rentrer si la nuit commençait à tomber.

Elle rajouta sa veste de tailleur à sa tenue. Plus elle serait vêtue pour faire face au Shérif mieux ça vaudrait.

Elle croisa quelques sombres individus sur le trajet, mais si ceux ci lui portèrent attention, elle pressa d'avantage le pas et parvint au bureau du shérif sans la moindre altercation.

Ce dernier était installé à son bureau et semblait préoccupé. Son second maigrichon était là également. { Joe si mes souvenirs sont exacts... } Dans la cellule du fond, Royer était roulé en boule sur sa couchette, probablement endormi.

Elle afficha un visage froid et distant, le visage qu'on lui avait appris à afficher durant ses études d'avocates, celui qu'il fallait utiliser quand on devait traiter avec un tueur d'enfants et qu'il fallait parvenir à défendre ses intérêts malgré son mépris pour l'individu. Elle les salua et vint s'asseoir en face du Shérif.

Ce dernier releva la tête vers elle et opina du chef.

" McGown... Déjà de retour? Vous auriez pu garder la jupe... " Il esquissa un sourire grivois que le regard froid d'Alis lui fit ravaler. Il fronça les sourcils. Il l'avait perçu comme fragile et manipulable, mais là, la femme qui se trouvait en face de lui semblait sure d'elle et déterminée. { Ça n'en sera que plus intéressant... }

" J'ai plusieurs questions concernant l'affaire que vous m'avez confié. "

" Je vous ai fourni tout mes rapports McGown... J'ai pas le temps. "

Alis se redressa et le toisa.

" J'ai lu tout vos rapports et mon client doit être exécuté dans, justement, peu de temps. "

" Déjà, vous faites pas semblant... "

Elle ne releva pas la flatterie.

" Actuellement il n'y a rien qui face état d'une quelconque altercation entre mon client et sa famille... Toutes ses "crises de démence" étaient toujours centrées sur les mêmes personnes, à savoir 3 de ses collègues. Ces 3 individus ont été agressés par mon client. Avec ses antécédents, ils auraient pu le faire incarcérer dans une prison d'état sans problème, n'est ce pas? "

" Oui, en effet mais... "

Alis le coupa, ne le quittant pas des yeux.

" Vous avez également écrit que mon client était en ville depuis quelques mois, c'était un étranger, comme on les appelle par ici. Il avait trouvé un emploi sur les docks et en a été renvoyé pour "Paranoïa" alors qu'il n'en était encore qu'au début de ses "crises". Je peux continuer? "

Le Shérif grimaça et hocha la tête.

" Mon client était donc sans emploi, et il aurait brulé sa propre maison, son propre toit, et assassiné sa famille, les seuls qui ne l'ont pas rejetés. "

Il allait ouvrir la bouche pour parler mais elle continua.

" Ce qui pourrait être discutable si les rapports d'arrestation de mon client ne faisait pas état de la présence de sa femme à chacune de ses sorties. "

Elle marqua une pause en fixant le Shérif qui commençait à se sentir à l'étroit sur sa chaise.

" Par contre on peut s'interroger sur l'absence de plainte de la part de ses collègues et de la présence de la femme de l'un d'entre eux, qui a signalé l'incendie et a témoigné avoir vu mon client quitter les lieux alors que la maison prenait feu. Et ce alors que cette dite dame habite à l'autre bout de la ville. "

Le Shérif la regarda les yeux écarquillés. Alis ne le quitta pas des yeux un instant, interprétant la moindre réaction de sa part. On n'entendait plus mouche voler. Un bruissement de tissu vint briser le silence. Royer s'était rapproché des barreaux et les observait sans rien dire. Le Shérif soupira et se recala dans son siège.

" Putain McGown, je suis sur que vous auriez fait un super boulot devant un tribunal. Mais là je peux pas aller voir la foule qui veut la mort de ce type et leur dire que c'est leur cousin, leur frère, leur mari qui est suspect. Pas sans preuves solides. " Il secoua la tête en soupirant.

Alis esquissa un sourire mystérieux.

" C'est tout ce que j'avais à vous demander. Je vais aller faire un tour sur les docks demain. Vous aurez vos preuves. "

Il grinça des dents.

" Faites pas la conne McGown, vous aurez pas le droit à l'erreur là bas. "

Elle crut déceler une trace d'inquiétude réelle, ce qui la déstabilisa légèrement.

" Je m'en souviendrais, maintenant j'aimerai parler à mon client. "

" Je vous le déconseille McGown... "

" Je ne sollicitais pas votre avis Roger. "

Ils se fixèrent pendant de longues secondes. Le shérif finit par détourner le regard.

" Très bien. Allez y. "

" En privé. "

Le Shérif la dévisagea à nouveau, grimaçant.

" ... Vous faîtes chier McGown, si j'avais su que vous étiez une telle emmerdeuse... "

" ... Ça n'aurait rien changé, on sait tout les deux que ce n'est pas pour mon caractère que vous m'avez embauché. "

Elle soutint son regard sans ciller. Le Shérif éclata de rire et se tourna vers son second qui essayait de se faire oublier.

" Allez Joe, on va faire un tour, laissons un peu d'intimité à ces deux là. McGown vous avez dix minutes, pas une de plus. "

Le regard d'Alis croisa celui de Luigi Royer, pendant que les deux agents quittaient la pièce. Si l'espoir avait une teinte, son regard avait cette couleur là.

Royer avait les traits tirés, la mine rougeaude, les yeux jaunâtres et vitreux. Il avait du être bel homme autrefois, mais l'alcool avait fait son oeuvre et l'avait rongé. Alis vint s'installer devant la cellule et le dévisagea quelques instants. Elle hocha alors doucement la tête.

" Monsieur Royer. Je suis Alistair McCrown, et à moins que vous ne formuliez une demande contraire, je serais votre avocate dans l'affaire de l'homicide de votre famille. "

Elle marqua une pause.

" Vous avez surement entendu les différents échanges que j'ai eu avec le Shérif? "

Il acquiesça, attentif.

" Bien, maintenant monsieur Royer, et c'est très important, j'ai besoin que vous me donniez votre version, toute votre version. Et nous avons peu de temps... "

Son regard devint fuyant et il sembla hésitant quelques instants, puis il releva la tête vers elle, visiblement fatigué.

" Ma femme... Et ma petite fille... Je les aimais autant qu'il soit possible d'aimer vous savez. (Il renifla.) Vous devez comprendre, je vous en supplie... "

" Comprendre quoi? "

Il soutint le regard d'Alis, les yeux rougis.

" Pourquoi je les ai tué. "

" Nous sommes arrivés à Shorecester des rêves plein la tête. J'arrivais pas à retrouver du boulot depuis des mois, je faisais de la manutention vous voyez. Et là on rechercherait urgemment quelqu'un, deux coups de fil et j'étais pris. C'était notre seconde chance... (Il secoua doucement la tête.)

Tout avait plutôt bien commencé, certes les gens étaient bizarres mais on s'disait qu'y s'habituerait, qu'on f'rait connaissance. J'avais un boulot et ça f'sait six mois que j'avais pas touché à une bouteille. Ma femme disait sans cesse qu'elle était fière et...

C'était grâce à elle tout ça...

J'ai commencé le boulot ça s'passait... Les autres me f'saient pas trop confiance, j'étais un étranger qui m'disaient. Je déplaçais surtout des caisses le plus gros de la journée.

Bref la routine, j'étais payé, j'en d'mandais pas plus.

Puis un soir qu'j'avais fait tomber mon portefeuille et que j'm'en retournais le chercher j'ai vu ces trois gars là; Avery, Romero et Sullivan mais y a un truc qui allait pas. J'ai pas su dire d'abord parce qu'y f'sait nuit donc j'me suis rapproché un peu sans m'faire voir. Et c'est là qu'j'ai vu... (Une lueur de peur passa dans son regard, il frissonna. Son ton monta avec sa nervosité. ) Ils avaient la peau grise et luisante et des mains, les mains les plus bizarres que j'ai jamais vu, avec des palmes et des griffes. J'vous l'jure sur ma défunte fille madame, j'avais pas retouché à une goutte d'alcool à ce moment, je vous supplie de me croire et eux là, ils descendaient dans l'eau avec des caisses et remontaient les mains vides comme ils auraient descendus des escaliers. (Alis fronça les sourcils mais garda le silence et l'incita d'un mouvement de tête à continuer.)

J'suis rentré chez moi à toute allure, jamais eu autant les chocottes de toute ma vie. Mais j'pense qu'ils m'ont vu, j'ai du heurter quelque chose, parce que le lendemain ils m'évitaient et dés que je regardais dans leur direction ils étaient entrain de m'épier.

J'savais pas trop quoi faire, ça m'inquiétait et je savais pas ce qu'ils allaient me faire alors j'ai voulu en parler au contremaître. Il m'a dit que c'était surement la fatigue, il avait l'air contrarié m'dame, mais pas surpris, j'sais pas, c'était bizarre. Il m'a forcé à prendre ma journée et m'a dit de revenir quand j'y verrais plus clair.

J'arrivais plus à dormir après ça, j'pétais un câble. J'ai rien osé dire à ma femme, j'voulais pas l'inquiéter. Pis ce soir là bas, y a eu cette bouteille et j'ai pas réussi... J'ai replongé. (Son ton s'affaiblit, il baissa les yeux et renifla une nouvelle fois.) Le lendemain... Le lendemain j'étais pas très frais et j'ai été les voir, je leur ai dit que je savais tout, j'ai commencé à m'en prendre à eux. Ça a dégénéré et j'me suis fait virer, à cause de ces putains de monstres... Ça a été de pire en pire après ça... J'ai essayé d'alerter les gens mais y me croyaient pas, j'suis devenu un espèce de fou, et plus ça allait plus j'me réfugiais dans l'alcool. Ma femme elle disait rien mais elle savait bien que ça allait pas. Elle a tout fait pour m'aider, elle a été patiente, j'la méritais vraiment pas... "

Alis était perplexe et tachait d'écouter avec attention le récit de Royer. Ce qu'il racontait collait plutôt bien avec les rapports du Shérif. L'homme avait clairement un problème d'alcool, mais il émanait de son récit bien trop d'émotion et de culpabilité pour que ce fut uniquement les divagations d'un alcoolique, elle le pressentait. Elle se massa les tempes et releva les yeux vers Royer qui énumérait les autres altercations similaires puis elle tiqua aux propos qui suivirent.

" Je savais plus trop quoi faire... Ça allait de pire en pire. Avec ma femme on a pensé à aller s'installer chez ses parents, à Boston, au moins le temps de voir plus clair. Cette ville était entrain de me faire perdre la tête. Mais bon sang, à croire qu'on voulait pas qu'on parte ; notre voiture a lâché, plus de téléphone... On a même essayé de faire du stop, de prendre la soi disant navette et j'en passe mais y avait toujours un truc imprévu qui n'allait pas.

Pis j'ai commencé à les voir qui rodait le soir autour de chez moi, jamais eu autant peur. J'peux vous assurer qu'ils sont pas humains. Même ma petite fille a hurlé de peur quand elle a regardé par la fenêtre.

J'en pouvais plus, je pouvais pas laisser faire, alors le lendemain je suis retourné là bas, je leur ai dit qu'ils s'en prennent à moi si y voulaient mais qu'ils laissent ma famille en dehors de ça. Pis là ils ont commencé à me ruer de coups, j'crois bien qui m'auraient tué mais y avait cette barre par terre et bon sang, j'étais déjà au plus bas, alors j'ai riposté et j'peux vous jurer qui doivent encore s'en souvenir aujourd'hui.

(Il serra les poings.)

J'ai voulu prévenir la police mais quand le Shérif a été là bas tout le monde a prétendu que c'est moi qui les avait agressé. A croire qu'ils sont tous dans je sais pas quel mauvais coup. J'ai passé quelques nuits en cellule pis apparemment z'ont pas porté plainte. (Il eut un rire nerveux.) Elle est bien bonne celle là.

J'savais que ça finirait mal alors on est rentré à la maison et ce soir là on a fait nos valises. Y a un chalutier qui devait venir décharger des marchandises le lendemain, on se s'rait faufilait à bord, peu importe où on aurait fini, on aurait quitté cette fichue ville.

Pis ils sont arrivés madame, ils étaient une dizaine au bas mot, des monstres, j'vous le jure sur ma vie, sur ma fille, sur tout ce que vous voulez. Aucun qui ressemblait à un autre, comme si y étaient tous plus ou moins poisson ou pieuvre ou je sais pas quoi. On s'est planqué dans la cave, on s'est barricadé. (Il ferma les yeux, des larmes roulant sur ses joues. ) Le pire c'était ce bruit, un mélange de pas, de frottement, je sais pas comment l'expliquer, comme si toutes les hordes de l'enfer étaient à nos trousses. Je les entendais qui s'acharnaient sur la porte, ma femme et ma fille étaient en pleurs. J'ai r'connu la voix d'Avery, il disait que c'était fini, qu'y allaient m'faire la peau, et qu'ma femme et ma fille...

(Il se mordit la lèvre au sang et secoua la tête avant de relever les yeux vers Alis qui semblait bouleversée.)

Ils ont dit que... Qu'ils leurs feraient subir d'horribles choses... Qu'elles porteraient leurs futurs progénitures... "

Il marqua une nouvelle pause, les yeux dans le vagues, ses larmes coulant à ne plus s'en arrêter.

" Bon sang, ma petite avait douze ans... C'était encore une enfant. Je les aimais, Ô bon dieu, je les aimais de tout mon cœur. Ma femme a compris, je crois qu'elle le voulait aussi... On aurait pas pu vivre avec ça vous savez... "

Alis resta silencieuse, le soutenant du regard. Elle avait compris, mais elle n'osa pas l'interrompre.

" Je les ai tué... Elles ont fermé les yeux, c'est comme si elles dormaient... J'avais pas le choix...

Quand ils sont entré qu'ils ont vu ça ils m'ont roué de coup, mordu, brûlé... Mais rien de ce qu'ils ne pouvaient faire n'aurait pu être pire que... Alors ils m'ont laissé là, inerte, et ils ont mis le feu...

Je sais pas pourquoi... Pourquoi j'suis sorti de là... J'ai bien failli pas le faire... Bon sang j'aurais du y rester... "

Royer éclata en sanglot, frappant rageusement contre les barreaux de sa cellule.

Alis resta silencieuse, mettant de l'ordre dans ses idées. Cette histoire d'hommes poissons la laissait perplexe, elle n'y croyait pas vraiment, mais entre l'alcool, l'état de choc après ce qu'il avait fait à sa famille... Il était fortement possible qu'une partie de son esprit ait eu besoin de projeter le comportement monstrueux de ses agresseurs de façon plus concrète.

Elle posa doucement sa main sur la main enserrant les barreaux et se rapprocha de lui avant de lui souffler à voix basse.

" Je vous crois Luigi. On va faire payer ces salopards, je vous le promet. "

Alis quitta le commissariat, la tête sur le point d'exploser. Ça faisait beaucoup à assimiler. Une partie de son travail était de déceler les mensonges et la vérité dans les propos que lui tenait son interlocuteur. Elle savait en tirer avantage. Là tout son sixième sens lui indiquait que Royer était sincère. Elle sortit de sa rêverie en heurtant le Shérif qui venait à sa rencontre et bafouilla une excuse.

" Et bien, vous faites une drôle de tête McGown... Vous avez vu un homme poisson? "

Il eut un rictus moqueur, ce à quoi Alis répondit par un soupir.

" Je pense qu'il y a une part de vérité derrière cette histoire. Je ne sais juste pas encore laquelle. Il faudrait surveiller les docks, je suis sur qu'il s'y passe de drôle de choses la nuit... " Elle releva les yeux vers lui cherchant son regard.

" Ecoutez McGown, on est deux ici, vous pouvez le voir. Je ne peux pas laisser Royer seul, que ce soit pour sa sécurité ou celle des autres. Et qu'est ce qui se passerait si vous aviez raison et que vous, Joe ou même moi nous retrouvions seul en face d'une horde de dockers furieux? "

Il leva les mains au ciel.

" Vous voulez qu'on laisse tomber si je comprend bien. " Elle croisa les bras, le défiant du regard.

" McGown, McGown, McGown... Je n'ai pas dit ça. Ecoutez, j'connais quelqu'un qui a un des bureaux là bas. Je vais y faire un tour de temps en temps, j'ai les clés. J'vous envoie Joe, ou j'viens avec vous et on pourra surveiller ce qui se passe sans prendre de risques. "

Alis fit une moue hésitante.

" J'imagine que ce serait sans doute moins risqué... " L'idée de passer la nuit dans un bureau isolé avec le shérif ne l'enchantait guère mais le temps tournait.

" Alors c'est entendu McGown, un de nous deux viendra vous chercher ce soir. " Il afficha un large sourire.

Alis passa le reste de la journée chez elle, à ressasser les propos de Royer. Elle se sentait nue sans accès à Internet pour y faire des recherches. Elle avançait à l'aveuglette et ça ne lui plaisait pas.

Elle fut soulagée de tomber sur Joe lorsqu'on frappa à la porte, peu avant la tombée de la nuit. Il semblait moins "insistant" que le Shérif.

" Mademoiselle... Le Shérif n'a pas pu se libérer alors heu... "

" Je vous suis Joe. " Elle lui adressa un sourire se voulant charmant, tant pour être aimable que pour le rassurer un peu. Il se contenta de hocher la tête avant de se diriger vivement vers la voiture.

Le trajet sembla interminable, Joe esquivant les tentatives d'Alis de faire la conversation tandis que le paysage demeurait terne et sombré peu à peu dans l'obscurité. Ils quittèrent finalement la route pour l'entrée d'un parking souterrain. Les mains de Joe tremblaient, il s'essuyait frénétiquement le front et la commissure des lèvres, anxieux.

" Quelque chose ne va pas? "

" Je... Ben... Y a pas d'lumière. "

La jeune femme, un peu abrutie par la route se redressa soudain dans son siège, fouillant le parking des yeux. Effectivement tout les parkings avaient normalement un éclairage principal, et obligatoirement un éclairage secondaire qui indiquait les sorties de secours et assuraient une visibilité minimale. Là rien, seul les phares de la voiture perçaient l'obscurité. Elle eut soudain froid, ce genre de froid dont aucun pull n'aurait pu venir à bout. Le parking était complètement désert, pas une seule voiture.

" C'est peut être une coupure de courant...? "

" Ben... C'est ce que j'ai pensé mais... Bah... La porte s'est ouverte donc... " Joe resserra ses mains sur le volant et plissa les yeux, se concentrant sur sa trajectoire au milieu des colonnes de béton.

Alis se mordit la lèvre et se força à respirer profondément. Puis elle éclata d'un petit rire nerveux.

" On fait une fine équipe... Si on commence à avoir peur du noir on est mal barrés. "

Les épaules de Joe s'affaissèrent légèrement et il osa un sourire en coin.

" Huhu... Vous avez raison... Désolé mademoiselle... "

Il rangea finalement le véhicule sur une place, coupa le contact et récupéra, un peu trop vivement pour être honnête, le fusil à pompe calé le long de son siège. Il se pencha ensuite vers Alis, visiblement gêné et ouvrit la boite à gant, en sortant une lampe torche qu'il lui tendit.

" Heu.. Si vous pouvez... "

Elle saisit la lampe et hocha la tête.

" Montrez moi le chemin, je vous éclaire. "

Ils sortirent du véhicule et prirent la direction de l'ascenseur le plus proche. Joe était tendu et concentré sur les ombres, comme si un ennemi allait surgir de l'ombre à tout moment. En temps normal Alis se serait moqué de l'agent des forces de l'ordre, mais à l'instant elle partageait son inquiétude.

Après ce qui lui sembla de longues minutes, alors qu'ils n'en étaient qu'à quelques mètres, ils atteignirent les portes de l'ascenseur. Le bouton d'appel luisait faiblement, Joe le pressa nerveusement plusieurs fois, tandis qu'Alis balayait les alentours de sa lampe. L'écho d'un couinement lointain la fit sursauter et se rapprocher de Joe qui se retourna, scrutant les ténèbres. De couinement il se mua en une longue plainte aiguë avant de stopper dans un craquement sinistre. Alis agitait sa lampe nerveusement à la recherche de quelque forme, en vain. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent, une sonnette annonçant son arrivée. Ils se précipitèrent tout deux à l'intérieur et Joe se hâta de presser sur le bouton du dix huitième étage, le canon de son fusil braqué vers l'ouverture de l'ascenseur.

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